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L’ermite de Resteigne : vie et mort d’un seigneur

11Avr, 16 | histoire, lieux, Personnages

Au lieu dits Les Gaudrées, dans le bois de Niaux qui domine Resteigne, le baron Edmond d’Hoffschmidt a laissé quelques traces d’une vie peu commune.

ermite_resteigne_1Si le corps de logis et la tour cochère de la façade sont datés de la fin du XIème siècle, c’est dans les premières années du XVIème siècle que la famille de Mérode construit ce qui va constituer l’actuel château de Resteigne. En 1633, le baron de Rouveroy le rachète, avec la partie de Resteigne dépendant d’Ave, puis l’ensemble passe à Arnold d’Hoffschmidt. Le dernier seigneur du lieu, Adolphe d’Hoffschmidt, est le père d’un bien singulier personnage : Edmond.

 

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Mais si vos pas vous mènent un jour dans ce coin enchanteur, et pour être compris de tous, évoquez plutôt “le Vieux Monsieur”. Ou, mieux encore, “l’Ermite”.C’est à Edmond, en effet, que l’on doit le site de l’Ermitage, auquel on accède en suivant le fléchage pédestre constitué par des losanges verts, au départ d’un carrefour en patte d’oie situé sur le sommet de la crête qui domine la vallée à deux pas d’une belle falaise calcaire.

 

 

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Du bâtiment lui-même, il ne reste pas grand chose, hors caves et fondations.

 

 

 

 

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L’abri contigu est de facture plus récente. Même si des vandales l’ont également réduit à l’état de ruine. Mais c’est sans aucun doute la “tour” et le bout de falaise voisins qui font tout le charme de cet endroit bucolique.

 

 

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Edmond a-t-il fait ériger les murs au départ de ruines existantes ? D’aucuns l’affirment, et ne manquent pas d’arguments. D’autres sources sont plus sceptiques : dans une région de vielle occupation humaine où les traces archéologiques ne manquent pas, il est tentant de voir des vestiges partout.

 

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Nous nous garderons de trancher, nous limitant à constater que la topographie et l’architecture de la robuste “grotte” qui demeure sont par trop typées qu’Edmond d’Hoffschmidt en ait laissé les plans au hasard. Fruit d’un esprit éclairé, cette manière de passage dans le ventre de la terre, percé d’une baie orientée à l’Est, constitue à tout le moins un appel à la méditation.

 

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Sur la paroi rocheuse voisine, des vers sont gravés.

 

 

PORTRAIT D’UN HÉRITIER

Tout ceci est bien beau, mais qui, au-delà de son état-civil, était Edmond d’Hoffschmidt ? Un être paradoxal, sans doute. Officier de cavalerie sous Napoléon Bonaparte, il mène ensuite une vie mondaine à Bruxelles, avant de se retirer sur les terres familiales de Resteigne.

Chagrin d’amour, dit-on. Ce qui n’empêche nullement l’ermitage qu’il fait construire, et ou il va vivre jusqu’à la mort de son père, en 1830, d’être, aussi, un pavillon de chasse où Vénus et Bacchus auront droit de cité. Ainsi un enfant naturel serait-il né d’amours moins érémitiques qu’ancillaires, et dont la descendance porterait encore de nos jours la chevalière du baron Edmond.

ermite_resteigne_11Libertin, mais point mufle, donc. Et si ses frasques défraient la chronique, c’est surtout sa générosité qui va laisser des traces. Dindin, le sympathiquement bourru patron du “Café de la Lesse”, nous donne son avis : “Je crois que c’était surtout un noceur au grand coeur. Par exemple, tout le monde tenait une vache, à l’époque. Et bien si une vache venait à mourir le matin, le gars avait toutes les chances de retrouver la plus belle de la ferme d’Edmond attachée dans l’étable le matin suivant. Et personne n’avait rien vu”. “Autre chose ? Il vivait à Bruxelles, l’hiver. Et il avait autant de chiens dans sa meute que de maisons à Resteigne. Dans chacune, il laissait alors une bête en pension, et le montant de celle-ci permettait au ménage de vivre décemment. C’était une manière comme une autre de faire l’aumône sans froisser les gens”.
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Autant de traits que ne dément pas le texte du testament, dont l’une des huit reproductions trône dans le royaume de Dindin : “L’héritier prélèvera une somme de 100.000 F au bénéfice des oeuvres de bienfaisance de Resteigne, elle sera placée à intérêt, le plus avantageusement qu’elle pourra. Le 3/4 de cet intérêt seront distribués aux vieux ouvriers qui ne peuvent pas gagner leur vie. Je voudrais qu’en ce village au moins on ne voye plus désolant spectacle d’hommes honnêtes réduits à mendier. Ceci est mon testament. A Resteigne, le 23 juillet 1857”. Qu’il se grattent, ceux qui se sentent galeux en lisant ces lignes.

 

 

Alors : ange, ou démon ? Sans doute, lorsqu’il décède le 12 mars 1861, les quelque 3.000 personnes présentes à son enterrement ont-elles assisté par la même occasion à celui d’une époque, et d’une façon d’être héritière d’une certaine chevalerie.

Amoureux du geste autant que du reste, guerrier, poète et philosophe, humble mais point sans panache, assumant tout et refusant la médiocrité, quitte a paraître excessif aux yeux du commun… Dors en paix et daigne recevoir mon Hommage, baron Edmond d’Hoffschmidt : ta manière d’humanité me plaît assez.

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Ecrit par :Patrick Germain /2007

Crédit(s) photographique(s):Patrick Germain
Crédit(s) iconographiques :Scan retaillé de la carte postale, gracieusement offerte par “Dindin”
Source :
•    Merci à Dindin, à son épouse et à son fils, au “Café de la Lesse” : +32(0)84388334 Et à l’ami Jean-Pierre, de Marraine Zulma (http://www.zulma.be)