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Beho : les couleurs du choeur | Gouvy

30 Avr, 16 | Arts et culture

La Chronique rapporte que le cheval de Herman II, comte de Salm retour des croisades et bellement pourvu en reliques, refusa obstinément de laisser le village de Beho derrière lui.  Venant d’une destrier rôdé en Palestine, pareil caprice ne pouvait être naturel. Le bagage sacré n’irait donc  pas plus loin : Herman décida d’ériger une chapelle pour y exposer lesdites reliques à la vénération, donnant naissance à la première église de Beho.

Plusieurs siècles durant, le reliquaire va attirer les pèlerins, les trois premiers jours de mai, Durant ces journées solennelles, le desservant  exhibe les reliques une par une depuis la bretèche à loggia qui s’avance toujours à la proue de l’édifice.

Supporté par de bien grimaçantes consoles en mascaron, cet ensemble original est  accolé à une imposante tour carrée dont l’origine remonterait au XI ème siècle, et dont la flèche – bien que redressée lors de la restauration de 1949 – a conservé une inclinaison destinée à mieux résister aux vents violents de S – S-O.

 

 

RELIQUAIRE

 

La première reconstruction de la nef remonte à 1712. Quelques années plus tard, des vandales s’emparent du reliquaire, qu’ils abandonnent dans la campagne voisine après l’avoir saccagé. En foi de quoi les autorités ecclésiastiques ne permirent plus l’ostentation de reliques dont on ne savait plus trop bien à qui, ou à quoi, elles correspondaient.

En 1865, toutefois, le curé obtint l’autorisation d’exposer à nouveau trois d’entre elles : une parcelle de la Sainte Croix, une relique de saint Pierre et une de saint Laurent.

Restaurées pour le dernière fois en 1924 par les Soeurs Victimes de Bommel, elles sont toujours visibles au travers des vingt oculus de la châsse due à Scholtus.

Omniprésent dans les églises et châteaux d’Ardenne à l’époque, le Maître bastognard livre ici, dans son style si particulier où le moindre centimètre d’espace se doit d’être comblé, un mobilier homogène sculpté en bois de chêne de 1713 à 1724.

 

 

LES FEUX DU DESTIN

 

À l’écart des grands axes, cet étonnant condensé de patrimoine ardennais n’échappe pas pour autant aux aléas de l’Histoire et du destin. Deux guerres mondiales, et le feu, ont passé par là.

Ainsi, lors de l’offensive de l’hiver 44 – 45, l’église subit-elle d’importants dégâts, à l’instar de l’ensemble du village. Restaurée en 1949, elle n’est pas quitte pour autant. Le pire, même, reste à venir.

 

 

Car durant la nuit du 14 au 15 février 1954, le curé est réveillé par la sonnerie des heures, au clocher. Six coups. Puis la demie. Puis sept. Or la montre du prêtre indique 4 heures 20 ! Pensant à une panne du système électrique, il décide d’aller couper le courant : on verra bien ensuite.

La suite, en fait, s’avère dramatique. Car c’est un incendie, qui a déréglé le mouvement d’horlogerie. Les villageois luttent contre le feu avec les moyens du bord, en attendant les pompiers de Vielsalm. Lorsque ceux-ci arrivent sur place, le sinistre est pratiquement maîtrisé, découvrant d’impressionnants dégâts. Le maître-autel de Scholtus, entre autres, a particulièrement souffert.

 

 

UNE EXPLOSION DE COULEURS

Il sera restauré. Toute l’église le sera. Le 15 janvier 1955, les adjudicataires se mettent à l’ouvrage. Tandis que deux sociétés grand-ducales effectuent les travaux de sculpture dans l’esprit de Scholtus, l’entrepreneur local Peters attaque le gros oeuvre.

Et Félix Dederichs, sous la direction du coloriste Londot, entreprend de réaliser la polychromie projetée par celui-ci avec l’aval de la Commission des monuments et des sites. Car les travaux de restauration ont révélé la présence de plusieurs couches de couleurs, lors du décapage du mobilier.

 

 

 

Le résultat est celui que l’on découvre aujourd’hui, en pénétrant dans le sanctuaire auquel il donne un cachet incomparable. Car si la polychromie n’est pas exceptionnelle dans nos régions, Londot, en l’occurrence, n’a pas cherché à « faire ancien ». En choisissant de laisser le temps poser sa patine sur des couleurs vives, il a contribué à faire de la petite église de village une oeuvre d’art vivante dont la renommée dépasse le cadre régional.

Le reste est affaire de goûts… et de couleurs… lesquels, c’est bien connu, ne se discutent pas. Reste que, fut-ce par simple curiosité, le déplacement vaut son pesant d’Indulgences.

 

Ecrit par :Patrick Germain /2008

Photos : P.Y. Sougne – Morgane Pairoux 2016

 

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